Soja : la France doit réduire sa dépendance

Tourteau de soja
Comment se porteraient nos vaches, porcs et volailles sans le soja ? Depuis plus de trois décennies, cette plante, sous forme de graines ou de tourteaux, est au cœur de l’alimentation de nos animaux d’élevage. En effet , grâce à sa richesse en protéines et à sa teneur élevée en lysine, un acide aminé essentiel, le soja est souvent le complément indispensable des céréales pour l’alimentation des animaux d’élevage. Mais la production de soja en Europe ne couvre que 1% des besoins des élevages et l'ensemble des productions riches en protéines végétales (pois, colza...) seulement 24%. La France et l’Europe importent donc des quantités importantes de soja. Les plus grands producteurs - et exportateurs - de soja dans le monde sont les Etats-Unis, le Brésil et l’Argentine.

La France sous dépendance

La France est le plus gros pays importateur et consommateur européen de tourteaux, produits dérivés de l’extraction industrielle de l’huile. Environ 25% proviennent du Brésil. Une forte dépendance qui est problématique. La France pourrait produire plus de soja si l’Union européenne s’en donnait les moyens. Mais en 1993, les États-Unis et l’Europe ont conclu un accord bloquant les surfaces européennes de cultures oléagineuses, donc de soja. La culture du soja présente pourtant de nombreux intérêts. Comme toutes les légumineuses (haricots, pois, luzerne,…), la plante a la capacité de prélever l’azote de l’air. Le soja permet ainsi d’économiser les apports d’engrais azotés. 75 % de la production se situent dans le Sud-Ouest, les autres 25 % sont cultivés dans l’est de la France (Bourgogne, Franche-Comté, Rhône-Alpes et Alsace).

Un important effort de sélection

La France est sans doute le pays de l’Union européenne à fournir le plus gros effort de sélection du soja en mobilisant des semenciers et la recherche publique, avec le soutien de la filière oléo-protéagineuse. Les agriculteurs et utilisateurs de soja disposent ainsi d’une large gamme de variétés adaptées aux diverses régions de production. Les teneurs en protéines ont constamment été améliorées depuis le début de la décennie. Les industriels de l’alimentation animale qui traitent la graine entière de soja préfèrent s’approvisionner en France en raison de la traçabilité, de la simplicité et de la sécurité de l’approvisionnement liées à la proximité géographiques des cultures. Les graines de soja « extrudées », issues d’un procédé industriel qui chasse l’humidité et renforce leur teneur en protéines, sont destinées en majorité aux volailles. Les débouchés potentiels du soja « français » pour l’alimentation animale sont estimés entre 50 à 60.000 hectares. Or seulement 23.000 hectares de soja ont été cultivés en France en 2008. En matière de soja, la France peut mieux faire et elle en a les moyens, de la création variétale à la culture et la transformation.
La croissance des importations de l'Union européenne a stimulé la forte expansion du soja dans le monde. En 35 ans, la production mondiale a augmenté de presque 500%. Un phénomène particulièrement localisé en Amérique du Sud, avec des taux de croissance annuels de près de 20% au Brésil, en Argentine, au Paraguay et en Bolivie. Cette exploitation à grande échelle a des conséquences environnementales graves. Pour ouvrir de nouveaux espaces au soja, la déforestation se poursuit. Chaque année, c’est l’équivalent d’un pays comme la Belgique qui se transforme en champs de soja. Or une forêt représente un stock de carbone 2 à 3 fois plus élevé qu’une terre cultivée. La dépendance de l’Europe pour ses protéines végétales n’est donc pas une bonne chose alors que le monde cherche à atténuer les effets du réchauffement climatique.
Il existe plusieurs possibilités pour remplacer le soja d’importation. Mais aucune n’est facile à mettre en place. C’est pour les bovins qu’il existe le plus de possibilités. Les élevages extensifs peuvent être autonomes grâce au pâturage et aux fourrages. Dans les autres élevages, les tourteaux de colza et de tournesol, la luzerne déshydratée, la féverole, le lupin et le pois protéagineux sont des substituts intéressants. Des éleveurs veulent aussi se protéger des hausses de prix importantes et brutales du tourteau de soja importé. Ils se sont tournés ver un tourteau de colza enrichi en protéines et en énergie. Ce tourteau de colza a des valeurs nutritionnelles intéressantes pour la santé des animaux et la production de lait et de viandes. Pour les porcins, il est également possible de réduire la consommation de soja en le remplaçant par des pois protéagineux, de la féverole ou du tourteau de colza. C’est pour les volailles, les premières consommatrices de soja, qu’il est plus difficile de trouver des alternatives au soja. Une production comme la dinde exige notamment des taux très élevés de protéines dans son alimentation. Le pois protéagineux et la féverole peuvent cependant être introduits dans les rations.
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