Au Svalbard, le patrimoine mondial végétal conservé sous la glace

La plus grande banque de semences au monde est précieusement conservée au Svalbard, sous la glace, dans l'une des villes les plus au nord de la planète. Et pour la découvrir, pas besoin de réserver un billet d'avion ou de s’équiper chaudement : une visite virtuelle est désormais disponible.

La plus grande banque mondiale de semences se situe au Svalbard, sous la glace. © Svalbard Global Seed Vault

Connaissez-vous l‘archipel du Svalbard en Norvège ? Ce bout de terre, recouvert à 60 % par de la glace, se situe à 4000 km de la France, dans l’Arctique. On y trouve la ville la plus au nord de la planète, là où le nombre d’ours polaires est supérieur au nombre d’habitants : pas plus de 2500. C’est également là, sur ces terres inhospitalières, qu’un consortium d’institutions internationales et de gouvernements (1) a décidé, en 2008, de créer la plus grande réserve mondiale de semences : le Svalbard Global Seed Vault, un coffre-fort gigantesque de graines provenant de tous les continents. 

4,5 millions de variétés végétales répertoriées et stockées

À travers le monde, le Svalbard Global Seed Vault n’est pas la seule banque de semences. Le plus souvent implantées près des lieux de production, toutes font office de mémoire et de stock de secours, au cas où.
Cependant, celle du Svalbard se distingue par sa taille, ainsi que par la diversité et l'origine multiple des espèces qu'elle abrite. Plus de 4,5 millions de variétés végétales y sont soigneusement entreposées dans trois « chambres à graines », chacune mesurant 10 mètres de large, 27 mètres de long et 6 mètres de haut.
Sous le permafrost, où le sol reste gelé en permanence, les conditions sont naturellement froides et sèches. La température est maintenue à -18 °C, et les graines sont placées dans des enveloppes, elles-mêmes conservées dans des boîtes stockées sur des étagères. Ce procédé réduit au maximum le métabolisme des graines, permettant ainsi leur conservation optimale. Certaines espèces pourraient ainsi rester viables pendant plusieurs dizaines de milliers d’années. Cependant, l'objectif n’est pas de laisser les semences vieillir indéfiniment. En effet, lorsqu’elles deviennent trop anciennes, elles sont replantées et renouvelées, en moyenne tous les 20 ans.

Une visite virtuelle immersive

Depuis 2023, le gouvernement norvégien, co-gestionnaire du site, propose une visite virtuelle gratuite et ouverte à tous de ce bunker unique. En quelques clics et à l’aide de votre clavier, vous pouvez parcourir les longs couloirs et galeries où sont stockées plus de 3 000 boîtes de semences. La visite virtuelle offre également des explications supplémentaires, disponibles sous forme de textes ou de commentaires audio dans différentes langues, pour approfondir certains aspects du site. Par exemple, vous apprendrez que les semences sont transportées par fret aérien dans des boîtes scellées, scannées à leur arrivée à l’aéroport pour s’assurer que seules des graines sont présentes. Une fois réceptionnées, elles passent par le Portal Room avant d’être réparties dans l’une des trois chambres de stockage.
Depuis 2022, des nanofilms de longue durée ont été apposés sur chaque boîte, permettant de stocker des informations sur les échantillons. Cela constitue une sécurité supplémentaire en cas de perte ou de corruption des bases de données.

Les défis du réchauffement climatique

Dans le contexte actuel du réchauffement climatique, l’avenir de cette banque mondiale de semences soulève certaines questions. Selon une étude récente citée par la glaciologue Heidi Sevestre, dès le début des années 2030, l’Arctique pourrait perdre toute sa banquise estivale, qui a déjà diminué de 40 % en 40 ans. Or, sans cette couche de glace réfléchissante, le réchauffement terrestre s’accélère, entraînant la fonte des glaces et l’élévation du niveau des mers. Chaque tonne de CO2 émise aggrave ce phénomène.
Résidente du Svalbard, Heidi Sevestre remarque qu’il n’y a pas de climatosceptiques dans cette région où le réchauffement est particulièrement visible : les températures y augmentent 6 à 7 fois plus vite que dans le reste du monde. Naturellement, le permafrost, ces sols gelés en permanence, est également affecté. Environ 20 % des terres émergées de la planète sont recouvertes de permafrost, mais leur superficie pourrait diminuer considérablement dans les décennies à venir. Dès lors, quel sera l’avenir de cette banque mondiale de semences ? Ce bunker naturel, qui bénéficie aujourd'hui de conditions climatiques idéales, pourrait à terme être menacé.

Pour réaliser une visite virtuelle du Svalbard Global Seed Vault, cliquez ici 

Anne Gilet

1- Ministère norvégien de l’alimentation et de l’agriculture, la banque de gènes régionale NordGen et le Crop Trust, une organisation internationale indépendante.

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