La sélection variétale, un travail de longue haleine

Entre sept et douze ans selon les espèces. Voilà le temps nécessaire pour créer, inscrire et multiplier une nouvelle variété. Même si le recours aux nouvelles technologies permet d’accélérer certaines étapes, le pas de temps reste long. On vous explique pourquoi.

Parcelle de sélection de graminées fourragères © SEMAE - Julien Greffier

La sélection variétale n’est pas une activité récente. Cette pratique aurait débuté il y a plus de 10 000 ans, quand l’Homme a commencé à se sédentariser. Il cultive alors des plantes pour se nourrir et choisit, après la récolte, les plus belles graines pour les ressemer l’année suivante. Sans le savoir, il vient d’inventer la sélection variétale. À la fin du 19e siècle, les premiers croisements de parents « choisis » débutent pour identifier les descendants qui correspondent le mieux aux attentes des agriculteurs : bonne conservation, productivité accrue, meilleur goût, facilité de culture… S’en suivent alors une accélération et une amélioration des process utilisés pour parfaire les techniques de sélection afin de produire, plus rapidement si possible, des variétés de plus en plus stables et homogènes dans le temps. Malgré tout, le délai pour créer une nouvelle variété reste long : entre sept et douze ans selon les espèces.

La semence, une solution pour répondre aux nouveaux défis du monde agricole

Pourquoi passer par l’étape de la sélection ? L’enjeu est de mettre sur le marché des génétiques avec des caractères intéressants et ainsi, répondre à des problématiques nouvelles. Tout commence par le croisement de deux plantes, choisies pour leurs atouts. À charge pour les sélectionneurs d’identifier ensuite dans les descendants ceux qui présentent les critères recherchés, associant si possible les performances de chaque parent : productivité, résistance aux maladies ou aux parasites, adaptation aux stress climatiques, régularité de la forme, qualités technologiques, adaptation aux transformations agroalimentaires… Au fil des années, les attentes vis-à-vis de l’agriculture augmentent et se diversifient : meilleur respect de l’environnement, utilisation moindre de produits phytosanitaires de synthèse, qualité nutritionnelle améliorée… Et à ce titre, la diversité et la qualité des nouvelles semences s’affichent comme l’une des réponses à ces nombreux défis.

De nouveaux outils pour cibler les critères à intégrer

L’objectif des croisements réalisés au cours des différentes années de recherche est de stabiliser les caractéristiques identifiées, ce qui est loin d’être facile. Pour réduire ce pas de temps, inhérent à la sélection « classique », les biotechnologies s’affichent comme des facilitatrices pour réaliser les croisements entre espèces, maîtriser et ajuster les transferts de caractères ou créer plus rapidement des lignées pures. En effet, quand un sélectionneur réalise un croisement entre deux plantes, il brasse un très grand nombre de caractères : ceux qu’il souhaite introduire dans la nouvelle variété, mais également ceux qu’il ne souhaite pas conserver, les « indésirables ». La connaissance fine du génome, le séquençage, la mutagenèse ou la transgenèse permettent de cibler et d’introduire un caractère d’intérêt bien précis, choisi.

Plusieurs étapes dans la sélection

Quelle que soit la technique utilisée, le schéma de sélection se décompose en quatre étapes :

- Recenser le matériel génétique existant pour identifier les caractères que l’on souhaite fixer.

- Observer, choisir et croiser différentes plantes pour réunir, au sein d’une seule, toutes les caractéristiques intéressantes recherchées.

- Créer, fixer et évaluer les nouvelles plantes une fois le croisement des parents réalisé. Les graines récoltées à chaque génération sont sélectionnées puis ressemées. À partir de la cinquième génération (F5), les caractéristiques des plantes  deviennent plus stables, c’est-à-dire qu’on les retrouve au fur et à mesure des croisements : le brassage des gènes est moins important. Pour la création d’hybrides, l’enjeu est de choisir les parents qui se combinent le mieux. Ces lignées pures et stables servent alors à créer des variétés hybrides, homogènes et reproductibles. Après la phase en laboratoire ou serre, les essais se poursuivent au champ, dans différentes régions, pour observer le comportement de chaque variété dans un contexte pédoclimatique donné. Ces différentes étapes peuvent prendre de 4 à 8 ans.

- Inscrire la variété au catalogue français ou européen. Déposée au CTPS (Comité technique permanent de sélection), elle passe deux ou trois années de tests. Seront jugés ses valeurs agronomique, technologique et environnementale (VATE) et ses critères de distinction, d’homogénéité et de stabilité (DSH). Une fois cet examen réussi, la variété est alors multipliée pour être commercialisée sous forme de semences certifiées : un gage de qualité. Ce process peut prendre de 3 à 4 ans.

Carole Loiseau

  • 1676 : découverte du rôle des organes sexuels chez les végétaux
  • 1865 : découverte des lois sur l’hérédité par Mendel grâce aux petits pois
  • 1880 : visualisation des chromosomes
  • 1908 : découverte de l’intérêt des hybrides sur le maïs
  • 1937 : premières cultures de tissus végétaux in vitro
  • 1953 : description de la structure en double hélice de l’ADN
  • 1960 : découverte du code génétique
  • 1986 : obtention du premier maïs transgénique
  • 2000 : premier séquençage complet d’une plante, Arabidopsis Thaliana
     

Chaque année, environ 500 nouvelles variétés végétales rejoignent les quelque 9 000 références (pour 190 espèces) déjà enregistrées au catalogue officiel français. Le catalogue européen rassemble quant à lui plus de 40 000 variétés.

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