La bière artisanale, un nouvel eldorado

Brunes, blondes, rousses se pavanent aujourd’hui en versions régionales ou en stars américaines revisitées « so french ». Retour sur une fabrication ancestrale. 

Des microbrasseries artisanales se développent dans les villes. © Isabelle Cordier

Cela ressemble au réveil du fait maison. Depuis une dizaine d’années, les bières artisanales reviennent un peu partout sur le territoire hexagonal. En 2018, on comptait 1 600 brasseries en France [1]. Si « l’appel de l’orge » est souvent une affaire familiale, produit d’une diversification vers l’activité brassicole entamée depuis longtemps par quelques agriculteurs céréaliers, il est aujourd’hui entendu par nombre de nouveaux entrepreneurs. 

Plus surprenant encore, des microbrasseries se développent au cœur des villes.
Il en est ainsi à Paris où est née « Bap Bap », la bière « brassée à Paris et bue à Paris », créée en 2012 par trois amis bordelais au retour d’expatriation de l’un d’entre eux, alors inspiré par les recettes américaines découvertes dans les bars de New-York.

Car il s’agit bien de recettes ! L’entreprise propose aujourd’hui cinq bières permanentes et cinq saisonnières, en fûts ou en bouteilles, artisanales, non pasteurisées, toutes produites dans la microbrasserie située sous le bar du XIème arrondissement qui les commercialise. Elle n’a rien à envier à une grande, avec silo à malt, moulin, salle de brassage, ligne d’embouteillage, laboratoire… 

Pas de mystère ! Pour faire une bière, il faut de l’eau, du malt d’orge ou de blé, du houblon et des levures. Formulées par type de bières, elles produisent la fermentation du moult, obtenu une fois tout le processus de brassage effectué. Selon la température de fermentation, basse ou haute, on obtient dans l’ordre une « Lager » ou une « Ale ». Blonde, rousse ou brune, chaque bière aura un goût différent selon le malt utilisé. 
 

L’orge, des variétés qui font la différence

Les malteries procèdent à la transformation des céréales qui consiste à faire germer les grains d’orge ou de blé par trempage afin d’obtenir les enzymes nécessaires, puis à les sécher pour stopper le processus de germination, au bon moment. Le malt noir est produit ensuite par torréfaction, essentiellement pour les bières brunes.

Les sucres contenus dans les différents malts déterminent le taux d’alcool par fermentation des bières. Leur texture en bouche dépend de l’espèce de céréale : l’orge et l’avoine donnent de la rondeur tandis que le seigle est plus sec par exemple. Les variétés d’orge sont primordiales pour obtenir les différents types de malts : Pilsner, Cara Vienne, Cara Red, Melanold, Pale, Carapils, etc. Elles font varier les goûts (chocolat, café, caramel), mais aussi les taux de protéines et la qualité des produits finaux. 
 

Le houblon, quant à lui, est un conservateur naturel à forte puissance aromatique selon les conditions de culture et les variétés. Cette plante grimpante, introduite au Moyen Age, apporte de l’amertume, contrebalançant les sucres du malt et surtout des notes herbacées ou fruitées telle que la variété américaine ‘Cascade’, très prisée. Il en existe deux-cent cinquante variétés dans le monde. Une fois récoltées, les fleurs de la plante sont séchées puis mises en pellets. Les houblonnières françaises sont essentiellement situées en Alsace, cependant la production n’est pas suffisante pour couvrir les besoins d’une consommation en hausse depuis cinq ans.

Isabelle Cordier

[1] Source : syndicat des Brasseurs de France.

La brasserie concasse le malt par broyage puis le brasse pendant 90 minutes dans une eau chauffée, pour faire ressortir les sucres. La mixture est ensuite mise en cuve de décantation pendant 1h30 pour obtenir un premier moult, très sucré, filtrée une première fois puis mise dans une cuve d’ébullition. Le houblon est alors ajouté. Après filtration, selon les recettes, des purées et des fruits sont incorporés lors d’une deuxième ébullition. Une fois les derniers dépôts retirés, le moult est refroidi par échange thermique puis placé en fermenteurs avec les levures. Son taux d’alcool est mesuré tous les jours pendant une semaine jusqu’à 5,8 %, pour les bières concernées, puis il est placé au repos à froid deux semaines avant son conditionnement en fûts ou en bouteilles.

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