Des semences certifiées bio

« En agriculture biologique, plus encore que dans l’agriculture conventionnelle, c’est la semence qui fait la différence ». Edouard Rousseau sait de quoi il parle. Il est agriculteur bio en Aunis (17) et président de la coopérative Corab, spécialisée en semences biologiques. « La semence doit être la plus performante possible, poursuit-il. En cours de culture, nous n’avons pas tout l’arsenal chimique pour combattre les attaques d’insectes et de champignons ». C’est pourquoi en céréales, Edouard Rousseau n’utilise que des semences certifiées par le SOC (Service officiel de contrôle et de certification), « un gage de sécurité et de bonnes récoltes ».

Pour des semences en bonne santé

Pascal Gury, agriculteur bio dans le marais poitevin et président de l'Agence Bio, a adopté la même stratégie : « Avec des semences certifiées, on est sûr d’être compétitifs, souligne-t-il. Utiliser des semences de ferme, c’est prendre le risque d’infester ses champs de graines de mauvaises herbes, telle que la folle avoine. Les semences de ferme peuvent également se révéler des vecteurs de propagation de la carie (maladie provoquée par un champignon) au sein de l’exploitation. Les semences certifiées qui font l’objet d’analyses sanitaires, offrent en revanche une garantie vis-à-vis du champignon ».

Recrudescence de la carie en France

La carie commune est actuellement en recrudescence en France, particulièrement en agriculture biologique. L’Institut technique de l’agriculture biologique (Itab) y voit deux explications : d’une part l’impossibilité jusqu’à une date récente d’utiliser des semences biologiques traitées chimiquement, et d’autre part, le fait que les agriculteurs ne connaissent plus la carie et ne prennent pas les précautions qui s’imposent. Le blé tendre est concerné, mais également à des degrés divers l’épeautre, l’engrain, le blé dur, le triticale.

La résistance variétale, axe de recherche prometteur

En agriculture biologique, même si deux produits peuvent désormais être utilisés en traitement des semences, c’est l’utilisation des résistances variétales qui apparaît comme la voie la plus prometteuse pour limiter la propagation de cette maladie. Des essais conduits par l’Institut du Végétal montrent qu’il existe des variétés peu sensibles à la carie du blé. Mais le champignon en cause semble avoir de fortes capacités à contourner la résistance variétale. L’expérimentation se poursuit visant à identifier les gènes de virulence du champignon présents en France, ainsi que les gènes de résistance présents dans les variétés.

Variétés spécifiques pour la filière bio

Utiliser des semences certifiées en agriculture biologique, c’est en effet miser sur le progrès génétique. « Nous donnons aux entreprises de sélection des moyens pour innover, estime Pascal Gury. Nous avons besoin de variétés bien adaptées à nos besoins ». Depuis 2004, la réglementation oblige les producteurs bio à avoir recours à des semences issues de productions biologiques. La profession des semences s'est organisée et a engagé des programmes de sélection pour créer et inscrire des variétés de céréales destinées à l’agriculture biologique dans le catalogue français. Celles-ci sont sélectionnées suivant des critères que l'on retrouve en sélection classique comme la qualité boulangère ou la résistance aux maladies, mais également pour des qualités spécifiques (couverture du sol pour lutter contre les mauvaises herbes et moindre faim d’azote au printemps).

Depuis 2004, la loi prévoit l’obligation d’utiliser des semences ou des plants biologiques pour la production biologique. La base de données gérée par l'interprofession des semences et plants, pour le compte du ministère de l’Agriculture (www.semences-biologiques.org) recense l’ensemble des variétés disponibles ainsi que les fournisseurs des semences ou des plants. Aujourd’hui, l'offre de semences et plants destinés à l'agriculture biologique couvre un large éventail de productions. En effet, 81 fournisseurs proposent des semences bio de 1.100 variétés dans 107 espèces.

En 2009, le total des surfaces en agriculture biologique et en cours de conversion s’est élevé à 670.000 hectares, selon les chiffres fournis par l’Agence Bio. C’est-à-dire presque 100.000 hectares de plus qu’en 2008. Chaque mois, environ 300 agriculteurs franchissent le pas de l’agriculture biologique. « Ce fort développement de la conversion devrait assurer rapidement un équilibre entre l’offre et la demande », estime Pascal Gury. « Nous serons à la fin de l’année 2010 à 3% des surfaces agricoles cultivées en agriculture biologique. On devrait atteindre les 6% en 2012 comme prévu dans les engagements du Grenelle ».
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