Sécheresse : comment répondre au déficit de fourrages ?

Moha, plante fourragère et de couverture du sol
Une sécheresse sévère au printemps peut fortement pénaliser la production fourragère. Il n’existe pas une solution mais un ensemble de solutions pour faire face au manque de fourrage. Certaines relèvent du court terme, d’autres du long terme. Dans le premier cas, on s’efforcera de reconstituer des stocks pour la fin de l’été et l’automne. Dans le second, on cherchera à s’assurer pour l’avenir. Tous les modèles d’évolution du climat prévoient en effet une augmentation très significative de la fréquence des épisodes de sécheresse et de canicule tout au long du siècle. D’où deux stratégies à suivre : semer de préférence des espèces potentiellement tolérantes à la sécheresse et à la chaleur et produire du fourrage à des périodes plus propices comme au printemps en utilisant des espèces et des variétés précoces.

Moha, sorgho et millet perlé pour des stocks d’été

Plusieurs plantes fourragères peuvent être semées pour constituer rapidement des stocks et faire pâturer les bêtes dès la fin de l’été. Lorsque les moissons sont en avance d’une quinzaine de jours en moyenne, cette implantation peut être précoce. L’idéal est de pouvoir semer très rapidement après les récoltes de blé ou d’orge afin de bénéficier de l’humidité du sol. Il existe d’autres plantes qui se satisfont de peu d’eau pour pousser l’été. C’est le cas du moha, du sorgho et du millet perlé. Le moha est « une roue de secours » classique. Une implantation au début d’été est optimale. Sa valeur alimentaire est satisfaisante s’il est pâturé à un stade jeune, d’autant plus s’il est associé à une légumineuse comme le trèfle d’Alexandrie. Il est également possible de le faucher ou de l’ensiler mais avant le stade épiaison pour préserver sa valeur alimentaire. Deuxième plante : le sorgho fourrager. Huit à dix semaines après son implantation, il peut être exploité en pâturage à condition qu’il ait atteint 60 à 70 cm de hauteur : à ce stade, il ne présente plus de risque de toxicité. Le sorgho fourrager peut également être ensilé ou fauché. Les variétés de sorgho de type BMR ont des tiges moins riches en lignine. Elles sont donc plus digestibles mais sont plus sensibles à la verse.

Le Ray-grass d’Italie pour constituer des stocks à pâturer

Pour obtenir rapidement de l’herbe à pâturer à l’automne, il faudra semer du Ray-grass d’Italie le plus tôt possible, à partir de mi-août, en profitant des pluies d’orages qui tombent habituellement à cette période. Selon les conditions climatiques d’après semis, le pâturage pourra débuter 50 à 80 jours plus tard. Une variété alternative produira davantage et plus rapidement mais devra être retournée. Une variété non alternative produira un peu moins vite mais est plus pérenne et pourra être conservée l’année suivante. L’implantation d’un Ray-grass d’Italie en fin d’été est une sécurité car il permet une sortie des animaux dès le début mars, à condition que la portance des sols soit suffisante. Le Ray-grass d’Italie est la graminée fourragère avec la fétuque élevée et le brome qui pousse le plus tôt en sortie d’hiver.

Le colza fourrager, le chou et la navette, d'autres possibilités

L’implantation d’un colza fourrager navette fourragère ou chou est aussi une possibilité pour obtenir rapidement en 50 ou 60 jours un fourrage vert appétant, de bonne valeur alimentaire et riche en protéine. En colza fourrager en semant dans les quinze premiers jours d’août avec des variétés d’hiver qui monteront moins en fleur, on pourra disposer à l’automne d’une production de 2 tonnes de matière sèche/ha. Le colza est principalement pâturé au fil de façon rationnée. En semant dans la deuxième quinzaine d’août avec des variétés précoces de printemps, on peut disposer ainsi en octobre-novembre, d’une production de 3 à 4 tonnes de matière sèche/ha. Les variétés de type hiver, plus productives et plus résistantes au froid peuvent être semées plus tard mais ne seront exploitables qu’en fin d’hiver. Le colza pourra être affouragé en vert ou pâturé au fil de façon rationnée.

Le sursemis, solution de réparation

Le sursemis est une solution de réparation qui permet d’améliorer une prairie dégradée ou de renforcer la présence de légumineuses sans avoir à détruire le fond prairial existant. La technique, plus difficile à maîtriser qu’un semis classique sur sol nu, nécessite quelques précautions, notamment de bien positionner les graines dans le sol. Un itinéraire possible : ouvrir le sol avec une herse, ensuite semer puis rouler. On peut compléter le roulage pour un passage d’animaux. Si la prairie est trop dégradée (présence importante de vides ou de mauvaises herbes), il faut la resemer intégralement.

A long terme, des graminées pérennes associées ou non à une légumineuse

A l’avenir, il faudra s’adapter à des conditions de plus en plus sèches et chaudes. Le choix des espèces se portera sur des graminées pérennes, associées ou non à une légumineuse. Dans les sols et les zones où les risques de sécheresse sont les plus importants, choisir un dactyle, une fétuque élevée ou un brome que l’on pourra essentiellement associer avec de la luzerne pour la fauche ou du trèfle blanc pour la pâture. Dans les sols frais et les zones humides, le Ray-grass anglais associé au trèfle blanc donne également de bons résultats. Il est important de bien soigner la préparation du sol, surtout pour les espèces dont l’installation est lente, de surveiller la levée pour la protéger contre les prédateurs et de désherber si nécessaire. Il faudra surtout choisir ses variétés en fonction de l’utilisation souhaitée de la prairie ainsi que des conditions pédoclimatiques car toutes les variétés ne se valent pas ! En mélange par exemple, une espèce mal adaptée sera très vite concurrencée par les espèces mieux adaptées et disparaîtra rapidement. En se référant au Catalogue officiel, on s’assure que les variétés ont subi avec succès les tests de valeur agronomique dans des conditions précises de sol et de climat. Julien Greffier, service communication de l'interprofession des semences et plants

Le dactyle est déconseillé dans les sols lourds et humides car cette espèce supporte mal l’excès d’eau. Il est par contre adapté aux sols séchants. Il a une installation lente. La fétuque élevée supporte bien les sols lourds et humides. Elle a également une installation lente. La fétuque des prés et la fléole ne supportent pas les conditions sèches et la concurrence des autres graminées en conditions océaniques. Ces espèces conviennent particulièrement bien en zones très humides ou à hivers très froids. La luzerne ne supporte pas les sols humides et très acides. Cette légumineuse est adaptée aux sols calcaires, voire légèrement acides, bien drainés. Elle est à utiliser avec précaution en pâturage en raison des risques de météorisation.
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