Ruminants, prairies et effet de serre

Parce qu'elles ruminent, les vaches émettent des gaz à effet de serre issus de la fermentation de leurs aliments. Cette information étonnante a souvent fait le bonheur des médias. Mais pour autant, faut-il supprimer les vaches ? La recherche agronomique et zootechnique commence à apporter des réponses.

Une responsabilité très partagée

Les dégagements des gaz à effet de serre en France sont dus aux transports (26%), à l'industrie (20%), au chauffage des bâtiments (19%), à la transformation de l'énergie (13%)... Les bovins interviennent pour 4,9% des gaz à effet de serre, par le méthane dû à la rumination (3,3%) et à leurs déjections (1,6%). D'une façon générale, depuis 1990, les émissions de gaz à effet de serre de l'agriculture ont diminué de 10%, alors que celles des transports et du chauffage ont augmenté chacune de plus de 20%.

Mettre les vaches au régime ?

Des études ont montré que les vaches laitières ont le même niveau de rejets de gaz quel que soit le système d'élevage : bio, herbager ou intensif. Par contre, il est possible de diminuer les émissions de gaz des élevages laitiers en changeant la nature de l'alimentation : réduction des apports protéiques, des aliments concentrés par rapport aux fourrages... Dans ce domaine, des progrès sont possibles mais limités. Les instituts de recherche se tournent donc de plus en plus vers les prairies.

Les prairies font des stocks de carbone

Un premier constat : les dégagements de méthane et de protoxyde d'azote issus de l'urine et de la bouse des vaches sont importants sous bâtiments, et extrêmement faibles quand les animaux sont dans les prairies. Ainsi, les rejets peuvent-ils être réduits par un allongement de la durée de pâturage. Autre avantage des prairies : elles stockent le carbone. Comment ? Par l'accumulation dans le sol de la masse des racines et des résidus des parties aériennes des plantes. Bien entendu, une prairie jeune est plus dynamique pour stocker le carbone. Sur un plus long terme, l'allongement de la durée des prairies temporaires et une intensification modérée des prairies permanentes accroissent le stockage du carbone. Globalement, le plancher des vaches, sous forme de prairies, stocke une grande part des émissions des élevages, voire leur totalité. Vive les vaches dans les prairies !
Les prairies occupent le quart du territoire européen. Sont-elles source (émissions) ou puits (absorption) de gaz à effet de serre ? La question est importante. C'est pourquoi 18 laboratoires de 9 pays européens ont mené en commun le projet européen GreenGrass coordonné par l'Inra de 2002 à 2004. Voici quelques résultats issus de ce projet: - En moyenne, les prairies étudiées représentent un puits de carbone de 2,4 tonnes de carbone par hectare et par an. - La capacité des prairies à capter du carbone est très variable selon le mode d'exploitation (fauche, pâturage...), les régions et les conditions climatiques. - En déduisant les émissions de méthane et d'oxyde nitreux par les bovins au pâturage, le bilan de gaz à effet de serre pour les prairies étudiées correspond à un puits modéré de 0,9 tonne de carbone par hectare et par an. Ainsi globalement, les prairies jouent un rôle positif de puits de carbone... si elles restent prairies.
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