Les fibres végétales, un avenir qui se construit

Champ de lin
Année internationale des fibres naturelles : c’est ainsi que l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) avait baptisé 2009. Pour cette organisation, l’objectif était de sensibiliser les consommateurs aux qualités des fibres naturelles, d’accroître les revenus des paysans producteurs et de promouvoir des mesures pour améliorer leur efficacité et leur pérennité.

Emergence de nouveaux débouchés

Depuis le début du XXIème siècle, les contextes économique (recherche de réduction des coûts des matières) et environnemental (réduction des impacts des produits industriels sur l’environnement) ont permis l’émergence de nouveaux débouchés pour les fibres naturelles. La substitution des fibres synthétiques (polyester, polyamide, polypropylène, polyacrylique…) par des fibres végétales issues du chanvre, du coton ou du lin présente en effet de nombreux avantages. Ce fut le thème développé par l'Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie (Ademe), lors d’une journée technique en 2009 intitulée «Fibres végétales : nouvelles applications pour le bâtiment, l’industrie et l’agriculture».

L'isolation, un marché en développement

Les matériaux renforcés de fibres végétales se déclinent sous des objets aussi divers que des hélices de refroidissement, des tableaux de bord de scooter ou des matériaux d'emballage. Le lin et le chanvre, plus particulièrement, sont de plus en plus utilisés par le bâtiment comme isolants en remplacement de la laine de verre. Le béton de chanvre, constitué d’un mélange de chènevotte (partie cellulosique ou bois de chanvre), d’un liant à base de chaux et d’eau, est le matériau multifonction type. Il bénéficie en particulier «d'une porosité ouverte qui lui confère de très bonnes performances thermiques et énergétiques», souligne Bernard Boyeux, vice-président de l'association Construire en Chanvre (CenC).

Des atouts environnementaux

Outre l'isolation en toiture, le béton de chanvre est également utilisé pour la réalisation de dalles isolantes ou le montage de murs. Alors que les constructions neuves devront à compter de 2020, présenter un bilan énergétique positif, M. Boyeux rappelle également que les fibres végétales renouvelables «stockent le carbone toute la durée de vie du bâtiment, soit en moyenne une centaine d'années». Les isolants naturels présentent ainsi de nombreux atouts environnementaux : isolation thermique, faible énergie pour leur fabrication et recyclage.

Certifier les biomatériaux

Si les biomatériaux offrent de nombreuses garanties aux professionnels du bâtiment, ils doivent être encore reconnus par les assureurs, notamment pour faire jouer la garantie décennale, comme avec les matériaux traditionnels. Il reste donc à élaborer des documents normatifs, ce qui devrait prendre un peu de temps. « Il faut aller vers la certification des produits biosourcés dans le bâtiment et associer les assureurs aux discussions », confie Jean-Louis Bal, directeur des énergies renouvelables à l’Ademe.

Qualités... et prix supérieurs

Les biomatériaux représentent seulement 1% du marché des matériaux de construction. En effet, leur prix est encore deux à trois fois plus élevé qu'un isolant traditionnel à base de laine de verre. «Le prix reste un frein pour bon nombre de clients mais c'est à nous de leur expliquer que les qualités techniques de cet isolant naturel sont supérieures», explique Olivier Joreau, gérant de la société Cavac Biomatériaux qui développe un isolant à base de chanvre et de lin. «Ce qui freine, c'est la méconnaissance des performances de ces fibres végétales », renchérit Benoît Savourat, président de la coopérative agricole Chanvrière de l'Aube. Selon l'organisation professionnelle Interchanvre, la culture du chanvre en hausse en France est passée de 8.000 ha en 2008 à 12.000 ha en 2009.
Qui est à l’origine des produits en matières plastiques et composites ? Autrefois, les boules de billard étaient en ivoire ! A l’occasion d’un concours, les frères Hyatt, imprimeurs dans l’état de New york, inventent la première matière plastique à partir de camphre et de cellulose : c’est le nitrate de cellulose ou celluloïd. Nous sommes en 1870 et quelques éléphants peuvent leur dire «merci». Source : Fédération de la plasturgie sur www.laplasturgie.fr
Parmi les nouvelles applications des fibres végétales, la plasturgie offre de belles perspectives. Ainsi, l'incorporation de fibres de lin ou de chanvre dans les matériaux thermoplastiques ou thermodurcissables remplace les fibres de verre. Les produits sont commercialisés notamment par la société AFT Plasturgie. Son principal marché reste le bâtiment. «Nous commercialisons un compound qui associe du PVC avec du chanvre ou de la farine de bois, pour faire des profilés de terrasse, pontons, barrières…», indique Hervé Faucheron, responsable du développement technique et commercial. Deuxième marché, l’automobile qui utilise des polypropylènes associés à 30% de chanvre. «Chaque application nécessite un développement pour adapter la matière première à un cahier des charges spécifique », poursuit Hervé Faucheron. D’où des travaux menés en partenariat avec l’Inra, l’université Bretagne Sud, les pôles de compétitivité IAR sur la Champagne-Ardenne, Plastipolis et Vitagora, en Bourgogne, avec le soutien de l’Ademe.
Une voiture peut contenir plusieurs kilos de chanvre, de lin, voire de sisal ou d'abaca : accoudoirs, tablettes arrières, médaillons de porte, dossiers de siège. Si en 2015, tous les nouveaux véhicules commercialisés en Europe devront être recyclables à 95%, les constructeurs, à l'instar de PSA Peugeot-Citroën, se tournent déjà vers ces matériaux «verts». Depuis avril 2009, toutes les Peugeot 207 sortent des usines avec une pièce du rétroviseur contenant 30% de fibres de chanvre. PSA souhaite tripler la part des matériaux «verts» dans les pièces en plastique des voitures à l'horizon 2011 pour atteindre une proportion de 20%, puis de 30% en 2015. Les composites thermoplastiques chargés de fibres naturelles (chanvre, lin), plus légers de 20 à 30% que les fibres de verre, permettent ainsi de réduire le poids des véhicules et les émissions de CO2.
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