Les Amérindiens : premiers sélectionneurs du tournesol

Tournesols en serre © Thierry André
Le tournesol appartient à la famille des astéracées, fleurs composées. Son nom scientifique, Helianthus annuus, le rattache à un genre qui comprend une cinquantaine d'espèces, toutes originaires d'Amérique, dont le topinambour. Cette parenté est un atout en termes de diversité agronomique et alimentaire : le tournesol peut être croisé avec ses « cousins », génétiquement proches.

La forme cultivée, une origine Amérindienne

Le tournesol est utilisé depuis longtemps par les peuples d’Amérique pour ses propriétés nutritives, médicinales, tinctoriales. Si la forme sauvage existe depuis plusieurs millénaires, l’archéologie suggère que la culture et l’amélioration du tournesol remonteraient à environ 3.000 av. J.-C. Selon de récentes recherches, le tournesol aurait été domestiqué dans le centre-est des Etats-Unis. D'un tournesol sauvage, essentiellement poly-flore et ramifié, les Amérindiens sélectionnent une plante ayant un seul capitule qui porte des graines plus grosses. Le tournesol est importé en Europe par les Espagnols au XVIème siècle, d’abord comme plante ornementale. C’est en Russie qu’il devient une plante oléagineuse de grande culture : au XVIIIème siècle, les Russes l'utilisent car il ne figure pas sur la liste des corps gras interdits par l'Église orthodoxe, lors du carême. La teneur en huile des graines passe de 20 % à environ 40 % au début du XXème siècle grâce à l’important travail de sélection réalisé dans ce pays.

La sélection moderne, patiemment à l’œuvre

Les premiers travaux de sélection moderne accroissent le rendement, la résistance à la verse, la teneur en huile (elle passe de 28% en 1915 à 45% en 1955) et l’auto-fertilité, c’est-à-dire l’aptitude à produire des semences en l’absence de pollinisateurs. Ils réduisent aussi l’aptitude à l’égrenage. Le tournesol est fécondé par des abeilles qui transportent le pollen d’une plante à l’autre, avec comme résultat une hétérogénéité de la précocité et de la taille. Des travaux français, dans les années 1960, introduisent une stérilité mâle d’une espèce apparentée, et permettent d’obtenir des variétés hybrides plus homogènes et plus vigoureuses, aux rendements accrus. Les sélectionneurs s’attachent aussi à rendre le tournesol plus précoce et plus résistant aux multiples maladies qui peuvent l'affecter sous climat humide. Les variétés hybrides peuvent bénéficier de résistances provenant des deux parents. Un parasite majeur comme le mildiou a ainsi pu être contenu, ce qui a contribué au développement de la culture du tournesol au cours des vingt dernières années, notamment en France. La sélection permet aussi une meilleure tolérance au phomopsis, maladie provoquant le flétrissement de la tige, et à la pourriture blanche du capitule. En parallèle, grâce aux travaux de sélection, la qualité s’améliore : les graines contiennent désormais environ 50 % d'huile, une teneur parmi les plus élevées pour une graine. Le taux d’acides gras saturés baisse (12%) et la teneur en vitamine E augmente. Aujourd'hui, les principaux nouveaux défis pour les sélectionneurs sont la résistance à l'orobanche (plante parasite des racines), au phoma (qui provoque une maturation trop rapide pour que les graines soient bien remplies), aux différents stress agro-climatiques (sécheresse, chaleur, froid, etc.), mais aussi la qualité des huiles, en particulier leur richesse en acide oléique. Environ trois cents variétés sont inscrites au Catalogue français, et plus de mille au Catalogue européen. Le renouvellement variétal est rapide, une variété n’étant en général commercialisée que pendant cinq ans. Le tournesol est devenu l'un des oléagineux majeurs en Europe, même si ses origines ne le disposaient pas a priori à la culture dans les zones froides ou humides.
La plante entière, si elle est récoltée avant maturité, est occasionnellement utilisée comme fourrage. Après la récolte des graines et l’extraction de l’huile, le produit restant, appelé tourteau, est utilisé en alimentation animale. Si la graine est décortiquée avant l’extraction de l’huile, le tourteau ainsi obtenu se situe parmi les meilleurs pour l’alimentation animale en raison de sa forte teneur en protéines (environ 45-55%) et de sa richesse en méthionine, un acide aminé essentiel. Les graines entières sont également utilisées en oisellerie.
On peut consommer les graines de tournesol telles quelles ou torréfiées (les amandes issues de la décortication sont utilisées en boulangerie), mais on en extrait le plus souvent l’huile. Elle contient des acides gras insaturés, intéressants d’un point de vue nutritionnel, comme l’acide oléique et l’acide linoléique, un acide gras essentiel. L’huile de tournesol est la plus consommée en France depuis les années 1970, et entre dans la composition des margarines. Le tournesol oléique est un tournesol spécialement sélectionné pour avoir un taux d'acide oléique dépassant 80%. Cet acide gras a en particulier l’avantage d’avoir une bonne stabilité à la cuisson. L’huile de tournesol peut être utilisée comme biocarburant pour les moteurs diesel. Elle sert également en cosmétique, en pharmacie. Elle intervient dans la fabrication de savons, de cierges, de peintures, de plastiques, de lubrifiants, d’encres, etc. Le tournesol est aussi une plante mellifère importante et à floraison estivale.
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