L’ail noir, un produit star aussi bon que sain

Fanny Boutarin, transformatrice d'ail blanc en ail noir

À l’honneur sur les tables des grands chefs, l’air noir déploie une vaste palette aromatique qui en permet un usage même en pâtisserie. Ce super-aliment aux vertus antioxydantes et immunitaires est produit dans la pure tradition japonaise par la Maison Boutarin. Dans cette entreprise familiale, M. Boutarin, agriculteur multiplicateur, cultive un ail blanc IGP Drôme que Mme Boutarin transforme en ail noir, par une longue cuisson à basse température qui rend les gousses naturellement noires et dont la texture prend celle de la pâte de fruit. À découvrir d’urgence !

Fanny Boutarin Maison Boutarin

Fanny Boutarin, vous êtes ambassadrice de l’ail noir Aomori. Qu’est-ce que cela signifie ?

Cela signifie que notre ail noir a reçu une certification qualité de l’association des Producteurs d’ail noir d’Aomori, au Japon. Il y a deux critères : l’équilibre aromatique et les qualités santé. Le savoir-faire japonais est plus respectueux du produit et donne un ail noir plus aromatique et un produit fini de haute qualité, ce qui correspond à notre démarche.

Les Japonais sont très curieux de notre manière française d’utiliser l’ail noir en gastronomie. C’est en définitive un beau partenariat.

Quelles sont les étapes de transformation de l’ail blanc en ail noir ?

Après la récolte en juin, on ventile de l’ail pendant 20 jours pour l’assécher, puis on calibre : on réserve les plus grosses têtes à la transformation en ail noir.

Ensuite, on met les têtes d’ail dans notre four japonais : il faut que le four soit plein pour qu’il ait suffisamment d’humidité. La première phase à 70 °C dure une journée : l’ail va transpirer. Pendant tout le process, la ventilation du four permet de bien répartir l’humidité et de faire en sorte qu’elle ne se dépose pas. Les sucres naturels se caramélisent et donnent naturellement cette couleur noire : c’est la réaction de Maillard en milieu humide. Ensuite, je descends la température à 65 °C pour 28 jours. Au bout de 10 jours, j’ouvre la machine afin d’ajuster l’hygrométrie, que je gère alors par évaporation. Je termine à 50 °C.

Quand on sort l’ail noir de la machine, on le laisse reposer pendant 2 mois, afin que les arômes se stabilisent. C’est là que l’on se distingue de la manière japonaise qui ne pratique pas cet « affinage ».

Pourquoi avoir choisi d’utiliser l’ail blanc IGP Drôme, que vous cultivez vous-même, pour la transformation en ail noir ?

Quand j’ai commencé mes recherches sur l’ail noir, je n’ai pas voulu me limiter à notre ail IGP Drôme et j’ai fait des essais sur les autres variétés d’ail de notre production mais ça n’était pas aussi concluant. Notre ail de printemps, parfait pour faire des pickles, a un peu moins de caractère. Le violet est très chargé en allicine et tout ne disparaît pas lors de la transformation en ail noir. L’ail blanc IGP Drôme contient un peu plus de sucres, il est vraiment intéressant en ail noir et un plus complexe d’un point de vue aromatique.

Il existe 31 variétés d’ail en France. Sont-elles toutes adaptables à la transformation en ail noir ?

Oui. Aujourd’hui, il y a 15 producteurs d’ail noir en France et chacun utilise sa variété locale. C’est comme pour le vin : chaque ail noir dépend de son terroir et de sa transformation.

D’ailleurs, même avec une production et un savoir-faire identiques, selon la teneur en sucres et en humidité de l’ail, on aura un ail noir différent. L’année dernière, nous avons récolté un ail gorgé de soleil et d’humidité et je l’ai transformé en ail noir sans passer par la case de ventilation. On a un millésime sur celui-là. Chez Anne-Sophie Pic, c’est le chef pâtissier qui l’utilise car on est presque sur des arômes de chocolat, de cerise.

Est-ce que vous replantez vos propres gousses d’une année sur l’autre ou achetez-vous des semences ?

Pour l’ail, on parle de plants car il n’y a pas de graines ou de semis. On plante une gousse qui va donner une tête.

Nous sommes producteurs d’ail de consommation. On travaille avec des producteurs de plants d’ail, qui sont nos voisins et avec qui nous faisons partie d’un groupement (GIE). La recherche a été réalisée par eux en partenariat avec l’INRAE, dès les années 1970. Nous travaillons ensemble sur l’évolution variétale. Nous préférons travailler sur notre ail blanc IGP Drôme parce que ce sont des plants locaux, réputés pour leur qualité.

Quel avenir pour l’ail noir ?

Il faut le faire connaître au plus grand nombre !

On est très heureux de cette aventure. Faire de l’ail noir nous a permis de progresser dans la connaissance de notre ail blanc. C’est un produit star, alors c’est autant d’occasions de parler de notre ail blanc IGP Drôme que l’on veut continuer à défendre.

 

Propos recueillis par Emilie Morin

LG
MD
SM