Des farines pour améliorer le goût et la texture des biscuits

Dr Aliette Verel - Recherche ingredients - Kraft Foods Europe - Biscuits

Quel type de farine recherchez-vous pour les biscuits ?

Dr Aliette Verel - Recherche ingredients - Kraft Foods Europe - Biscuits
Le gros du marché des biscuits est constitué de produits de biscuiterie sèche. Ce qui implique que l’on recherche des produits finaux très secs. Dès lors, il faut donc réussir à générer une pâte avec ce très peu d’eau. La capacité d’hydratation de la farine doit donc être la plus faible possible. C’est pourquoi on utilise des variétés de blés « tendres » tendres spécialement adaptées aux biscuits, à distinguer des blés « tendres » durs, destinés à la panification. En effet, leurs caractéristiques sont aux antipodes de ce que l’on recherche pour le pain. Les blés « tendres » sur le marché sont plus ou moins « durs », c’est-à-dire qu’ils sont plus ou moins friables. Cette composante est essentiellement génétique et varie selon les variétés de blé. Un blé « tendre » friable, dit dur va présenter beaucoup d’amidon endommagé une fois le blé moulu. Cet amidon endommagé absorbe beaucoup l’eau. En revanche, les blés « tendres » plus tendres ont moins d’amidon endommagé après avoir été réduits en farine et une granulométrie (= taille des particules) plus fine : ils attirent moins l’eau. Ce critère s’avère toutefois nécessaire mais pas suffisant.

Quel est l’autre paramètre que vous prenez en compte ?

La qualité en protéines du blé. Actuellement, nous essayons de définir les qualités de protéines dans les blés tendres qui conviendraient à la réalisation des biscuits. En ce qui concerne la quantité, nous nous sommes rendu compte que cette teneur ne devrait pas dépasser un certain seuil, qui tourne autour de 11%. Avec les variétés de blé actuelles, ce critère ne pose pas de problème. En effet, les blés « tendres » biscuitiers sont cultivés différemment des blés destinés à la panification, pour lesquels on apporte généralement 3 apports d’engrais à base d’azote pendant la culture, car le but est d’obtenir beaucoup de protéines. En revanche, quand on cultive un blé « tendre », destiné à la biscuiterie ou à l’alimentation animale, on va se contenter d’apporter deux apports azotés durant la culture. Ainsi, ces blés ne contiennent au final pas plus de 11% de protéines !

Est-il difficile de s’approvisionner en farines biscuitières en France ?

Globalement non, car l’offre correspond à peu près à la demande. Mais il est intéressant de rappeler que plus de 95% des surfaces de blés cultivées correspondent à des blés « tendres » durs et que moins de 5 % des blés sont issus de variétés biscuitières et/ou fourragères. Cette tendance est assez récente : il y a 50 ans, les sols français n’accueillaient que des variétés de blé qui étaient utilisées à la fois pour le pain et les biscuits. Pour faire face à l’industrialisation de la boulangerie, et pour limiter l’importation de blés nord américains, les sélectionneurs se sont attachés à développer des variétés de blés à forte valeur boulangère. C’est pourquoi il est de plus en plus difficile de trouver des variétés de blé biscuitières.

Dès lors, quelles sont vos attentes envers les sélectionneurs ?

A l’heure actuelle, la recherche en sélection variétale du blé « tendre » tendre représente un petit marché, car seuls 2% du blé sont utilisés par la biscuiterie. On peut tout de même rappeler qu’en octobre 2010, deux nouvelles variétés biscuitières ont ainsi été inscrites. Mais, en moyenne, dix ans sont nécessaires pour développer une nouvelle variété de blé. Pour n’en citer qu’une, la variété Crousty, de très bonne qualité biscuitière, arrivée sur le marché il y a une quinzaine d’années, n’est plus suffisamment compétitive en matière de rendement. Or cette question de rendement est cruciale, car un agriculteur ne va pas cultiver à perte. Nous travaillons donc avec les sélectionneurs en leur faisant part de nos besoins, dans le but d’obtenir des variétés qui conviennent à la fois aux agriculteurs et aux biscuitiers.

Quels sont vos besoins sur lesquels travaillent les sélectionneurs ?

Nous travaillons actuellement sur l’effet des pentosanes. Ces composés situés en périphérie du grain de blé, ont une très forte capacité d’absorption d’eau. S’ils sont présents en trop grande quantité dans la farine, les biscuitiers doivent mettre davantage d’eau dans la pâte. Et pour extraire cette eau, ils sont obligés de cuire davantage les biscuits… qui risquent alors d’être plus durs et moins développés ! On essaye donc d’identifier les qualités de pentosanes les plus adaptées à la biscuiterie et d’évaluer s’il existe une valeur seuil de pentosanes à ne pas dépasser. Une partie de la réponse est variétale, l’autre est climatique, car la teneur en pentosanes des blés varie chaque année.

L’écologie intervient-elle dans le choix des variétés de blé ?

Oui ! Car nous désirons obtenir des variétés de blé les plus résistantes aux maladies pour que les blés reçoivent le moins de traitements possible. Car on fabrique des biscuits à base de farine complète, avec les enveloppes externes du grain de blé ! Et comme un grand nombre de biscuits contient une proportion de céréales très significative, nous sommes attachés à ce qu’elles soient obtenues en remplissant un cahier des charges environnemental.

Privilégiez-vous certaines variétés pour leurs caractéristiques nutritionnelles ?

Pas encore, mais c’est une piste de réflexion sur laquelle nous sommes en train de travailler. L’idéal est de disposer de blés qui, tout en gardant leur qualité technologique, auraient également des qualités nutritionnelles (vitamines, minéraux, fibres, etc.).
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