Notre association gère trois jardins d'insertion

Cécile Ménager - Directrice de l'association Plaine de vie - Ezanville (Val-d'Oise)

Votre association gère trois jardins d’insertion. Combien de personnes y travaillent ?

Cécile Ménager - Directrice de l'association Plaine de vie - Ezanville (Val-d'Oise)
L’association porte actuellement trois jardins. Le premier, le jardin Cultivons la Solidarité, créé en 1998, et le second, le potager Edith Warton, mis en place en 2005, sont des espaces de maraîchage. Le tout représente 4,1 hectares de terrains cultivés, certifiés Ecocert, car nos légumes sont bio. Le troisième jardin, le Chantier Environnement Patrimoine, créé en 2008, est un chantier d’entretien des espaces verts. 24 salariés en insertion et 9 permanents de l’association y travaillent. Les paniers sont vendus à un réseau de 200 adhérents consom’acteurs, qui peuvent mettre à disposition leurs compétences.

Vos trois jardins d’insertion s’ancrent dans une dynamique locale et de préservation du patrimoine. De quelle manière ?

L’activité développe du lien social entre les personnes qui participent à la vie de l’association. Ainsi, les adhérents peuvent venir chercher leur panier bio sur six points de dépôts, ce qui leur permet des échanges conviviaux autour des recettes, de la découverte de nouveaux légumes, etc. On a aussi mis en place deux jardins pédagogiques et aromatiques, destinés à la sensibilisation des enfants. Ils y apprennent notamment le lien entre les légumes et la terre : lors d’une animation, seuls 3 enfants sur 150 ont su reconnaître un poireau ! Notre activité est aussi ancrée dans le tissu local dans le sens où on fait travailler les petites entreprises locales : on s’approvisionne en équipements de protection individuelle, on fait réparer nos camions chez notre voisin le garagiste, etc. En termes de préservation du patrimoine, le maintien d’une activité de maraîchage sur les terrains communaux permet aux maires de ne pas urbaniser ces espaces. Et grâce à nos pratiques douces (travail à la main, absence de gros engins, agriculture biologique), on participe à la protection de la faune et de la flore des terrains ainsi entretenus. Le petit patrimoine paysager est aussi préservé, notamment les lavoirs, les sentes, les cimetières ou les abords du château d’Ecouen.

Les collectivités locales peuvent contribuer à la vie de votre association. De quelle manière ?

Elles disposent pour cela de plusieurs moyens. Notre association n’a pu voir le jour que grâce à la mise à disposition gratuite, par la mairie d’Ezanville (95), de parcelles agricoles sur lesquelles a été installé le premier jardin. A nos débuts, la mairie nous a aussi prêté un hangar et a financé l’eau et l’électricité. Parallèlement, les collectivités locales peuvent accorder des subventions à l’année. Par ailleurs, elles peuvent fournir des missions de chantier d’espace vert pour nos salariés en insertion. Par exemple, la mairie d’Ecouen nous fait nettoyer ses sentes via une convention annuelle, à raison d’une journée par mois. On nettoie également le lavoir tous les trimestres. Des missions ponctuelles nous sont confiées par des marchés de gré à gré de moins de 4.000 €, comme le fauchage de talus, l’entretien ponctuel du cimetière, le désherbage d’une réserve foncière, etc. Les mairies peuvent aussi insérer des clauses sociales dans leurs appels d’offres. Les sociétés qui les remportent doivent faire appel à des structures, comme les jardins d’insertion, pour remplir leur engagement. Enfin, les communes peuvent nous envoyer des salariés à employer, via le Centre communal d'action sociale (CCAS).

Vous parlez des subventions accordées par les collectivités. Quelles sont vos sources de financement ?

L’Etat nous indique de ne pas dépasser les 30 % d’autofinancement. La raison : ne pas faire concurrence au secteur marchand. Pour compléter les ressources de l’association, l’Etat, la Région, le Conseil Général, les communes, les fondations, certaines Agences, etc., nous procurent des subventions ou des aides aux employeurs, pour cofinancer les CUI (Contrat Unique d’Insertion), ou des aides à l’accompagnement. Il nous est nécessaire de diversifier les sources pour assurer notre pérennité. Cela représente beaucoup de travail en termes de dossiers et de bilans. D’autant que pour survivre, actuellement, il faut sans cesse augmenter son activité. Rares sont les aides qui financent le fonctionnement dans la durée. Peut-être nous faudra-t-il, en 2012, créer un quatrième chantier !

Quel est l’intérêt de votre structure par rapport à d’autres, telles que Pôle Emploi, qui travaille à la réinsertion ?

On embauche des personnes parmi les plus éloignées de l’emploi, qui souffrent de multiples difficultés sociales et professionnelles. Actuellement, l’Etat estime que 25 % de nos salariés en insertion devraient achever leur contrat en ayant obtenu un CDI ou un CDD d’au moins six mois. Un chiffre tellement élevé, que je ne suis même pas sûre que Pôle Emploi l’atteigne ! Notre crainte pour l’avenir : que l’Etat conditionne ses aides financières à cet objectif d’emploi. Si c’est le cas, on sera contraint de sélectionner les personnes les plus proches de l’emploi, et donc d’abandonner toutes ces personnes qui ont tant besoin du tremplin du jardin d’insertion. Car c’est un support de travail exceptionnel : l’impact sur les individus est incroyable !
LG
MD
SM