Le déclin des abeilles n'est pas inéluctable

Philippe Lecompte - Président du réseau Biodiversité pour les abeilles. Photo Thomas Turini

Que faire pour enrayer le déclin des abeilles ?

Philippe Lecompte - Président  du réseau Biodiversité pour les abeilles. Photo Thomas Turini
La mortalité des colonies d'abeilles est un phénomène complexe reposant en toile de fond sur un manque de ressources alimentaires lié aux modes d’occupation de l’espace rural auquel s’ajoute la non maîtrise des pathogènes et le transport des virus par un parasitisme originaire d’Extrême-Orient, durablement installé et impossible à éradiquer dans la situation présente. Je reste toutefois persuadé qu’il est tout à fait possible de renverser la tendance. Si l’on préserve un peu mieux les prairies naturelles, si l’on optimise l’utilisation des espaces périphériques aux champs de production agricoles (bords de champs, jachères apicoles…) ou si l’on se contente de faucher les talus une fois par an, les abeilles se porteront déjà mieux.

Quel est l’intérêt des jachères fleuries ?

L’espace agricole avec la multiplication des monocultures est aujourd’hui défavorable aux abeilles. Dans ce contexte, les jachères fleuries compensent une ressource disparue. Les abeilles sont en effet très attirées par des variétés de fleurs devenues rares et qu’elles viennent butiner avec intérêt. Les jachères apicoles s'inscrivent aujourd’hui dans le cadre réglementaire des « Bonnes Conditions Agricoles et Environnementales » ou BCAE. De 400 ha en 2007, on est passé à 3.500 ha en 2010 et la progression se poursuit. Nous mettons beaucoup d’espoir dans la future Pac (Politique agricole commune) qui sera mise en place en 2014 et pourrait donner un coup de pouce supplémentaire au développement des jachères dans le cadre des BCAE et de l’écoconditionnalité.

Faudra-il mobiliser les zones non agricoles pour sauver les abeilles ?

Les zones non agricoles doivent bien sûr être mobilisées. Le réseau Biodiversité pour les abeilles travaille aujourd’hui sur un projet de partenariat avec RTE (Réseau transport d'électricité), qui dispose d'un réseau de 10.000 ha de tranchées forestières.

Le miel des villes est-il meilleur que le miel des champs ?

Les abeilles des villes sont en général bien bichonnées par leurs apiculteurs. Mais le phénomène reste anecdotique : Reims accueille par exemple 57 ruches alors que les champs de Champagne-Ardenne en compte 30.000. Ce qui est certain, c’est que les ruches en milieu urbain bénéficient de facteurs favorables au développement des insectes en général et des abeilles en particulier. La nourriture est continue et souvent plus diversifiée qu’à la campagne. Mais s’il n’y a peut-être pas d'insecticides en ville, on trouve bien d'autres contaminants tels que les métaux lourds et les résidus d’hydrocarbures et de peintures.

Comment se portent les apiculteurs en France ?

L’apiculture est devenue une activité nécessitant une très forte technicité. Les seuls producteurs qui s’en sortent sont ceux qui maîtrisent les pathologies et leur marché, comme le miel de lavande, ou qui ont un label, comme Agriculture Biologique (AB).
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