Qu’est-ce qui vous plaît dans votre métier ?
Ce qui me plaît, ce sont les enjeux et la diversité des missions dans un contexte agricole, politique et environnemental en perpétuelle évolution.
J’ai aussi voulu garder un vrai contact avec le monde agricole, dont je suis issu : le lien permanent avec la nature est primordial pour moi. J’aime intervenir sur l’ensemble des filières, entre l’agriculteur, le distributeur et le semencier, cela me donne une vision large du métier, et de l’utilisation qui est faite des
variétés que nous vendons.
Combiner les données « champ » et les données issues des nouvelles technologies est aussi un aspect intéressant du métier.
Quelles sont vos « sources » pour l’amélioration des plantes ?
Nos sources sont les collections (Nationales ou Mondiales) et les échanges entre partenaires des différents pays. Le travail sur les
ressources génétiques suppose d’aller chercher de la diversité, car c’est dans la diversité que se trouvent l’
hétérosis, les
gènes d’intérêt et la complémentarité des
génomes. Il faut aller chercher cette biodiversité précisément là où les
espèces se sont diversifiées dès le départ.
Nous allons aussi vers des collections nationales, auxquelles nous participons activement, c'est-à-dire que nous les enrichissons nous-mêmes. Les collections servent avant tout à maintenir la diversité génétique globale, diversité plutôt ancienne. Nous brassons des génomes existants et les assemblons différemment. Créer de la diversité, c’est repérer au sein des
variétés anciennes, les
caractères génétiques intéressants, parfois peu représentés au sein de l’espèce, que nous allons utiliser.
Que faites-vous pour les préserver et les régénérer ?
Nous participons activement à l'enrichissement des collections et au maintien des ressources existantes par multiplication sur nos stations. L’
obtenteur peut, s’il le souhaite, confier son matériel génétique libre de droits à une collection nationale, une collection de réseau ou une collection de conservation.
L’association Prosorgho (regroupement de plusieurs
sélectionneurs) a recueilli les collections de l’INRA (Institut National de la Recherche Agronomique) et du
GEVES (Groupe d’étude et de contrôle des
variétés et des
semences). Nous agissons en partenariat avec le CIRAD (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement) pour conserver ces précieuses ressources. L’association ou les membres du réseau se chargent de multiplier les semences lorsque la qualité ou la quantité des semences stockées devient déficiente. Un travail de description et de caractérisation de ce matériel peut aussi être demandé au multiplicateur.
Pour le soja, nous avons toute la collection INRA (environ 1.500 accessions) à gérer.
Qui peut les utiliser? Sont-elles accessibles à tous ?
Globalement, dans une collection nationale, tout est accessible, la biodiversité est un « bien public » ouvert, mais bien sûr transmis selon certaines règles.
Dans les collections de réseau, le matériel est libre de droit pour les membres du réseau. Il peut être utilisé par tous les membres du réseau. Pour être membre d’un tel réseau, il faut « donner » du matériel. C’est « donnant-donnant ». J’amène une contribution, j’appartiens au groupe et j’obtiendrai en échange quelque chose…
La collection de conservation, ce sont les
semences encore protégées : nous les mettons ici pour que les
variétés ne disparaissent pas. C’est une garantie pour que la ressource génétique soit bien conservée quelque part. Dans le cas contraire, après commercialisation, il peut y avoir désintérêt et perte de la variété. Nous estimons ainsi que toute variété créée doit être conservée. Nous ne sommes pas là pour juger de son intérêt. Nous estimons qu’il faut conserver la biodiversité, par définition, et que certaines ressources pourront potentiellement nous intéresser dans le futur.
Dans tous les cas, la décision finale de mettre une variété dans une collection appartient à l’
Obtenteur de ladite variété.
Comment identifiez-vous les attentes de la société ? Comment y répondez-vous dans votre métier de sélectionneur ?
Comment identifiez-vous les attentes de la société ? Comment y répondez-vous dans votre métier de
sélectionneur ?
Il s’agit d’aller vers le durable, l'économe et la préservation de la santé et de l'environnement. Nous devons mettre en place des programmes de sélection prenant en compte ces demandes. Il faut rechercher la diversité génétique adaptée à ces enjeux.
Citez-nous quelques exemples concrets d’amélioration végétale
Chaque année, les semenciers mettent au point des nouvelles
variétés utiles à l’agriculture, que ce soit en termes agronomiques (moindre utilisation des produits phytosanitaires) ou économiques. Voici en particulier quelques-uns des nombreux progrès résultants de l’amélioration végétale :
- la teneur et la qualité de l’huile chez les oléagineux (par exemple, chez le colza, amélioration du rapport oméga 3/oméga 6, bénéfique pour notre santé) ;
- la teneur en protéines pour le soja (augmenter la teneur en protéines est positif pour l’alimentation humaine, être moins dépendant des importations, répondre aux besoins des fabricants d’aliment du bétail) ;
- a qualité des blés panifiables ;
- le progrès de la résistance aux maladies ;
Nous développons aussi des variétés moins sujettes aux mycotoxines qui sont néfastes à la santé.
Comment est financé ce travail de recherche ?
La recherche est financée par les entreprises semencières qui tirent leurs revenus de leur travail, c'est à dire des ventes de
semences des
variétés qu'elles ont mises sur le marché. C’est bien grâce à nos variétés mises sur le marché que nous avons cet autofinancement. Nous participons aussi à des appels d’offre public-privé.
Quel est l'intérêt du « Certificat d'Obtention Végétale » ?
Le Certificat d’Obtention Végétale sert à protéger l'
obtenteur de toute copie et de l’utilisation frauduleuse d'une variété ou de
lignées parentales sans l'autorisation préalable de celui qui les a créées.
Le Certificat d’Obtention Végétale protège le travail de recherche, qui se fait à long terme, sur une dizaine d’années. Sans COV, quelqu’un d’autre pourra tirer profit indûment de nos découvertes. Le COV nous sert à la recherche dans son ensemble, c'est-à-dire à entretenir la diversité biologique et à initier des programmes de recherche qui répondront aux nouvelles évolutions de l’agriculture, de l’environnement et de la santé.