Comment inscrit-on une nouvelle variété de chicorée au Catalogue Officiel des Espèces et Variétés ?
C’est un processus assez long, qui nécessite en général deux ans. En amont, les maisons de
semence proposent une variété. Elle est examinée par les groupes d’experts pour voir si ses caractéristiques sont intéressantes. Ils sèment donc cette variété précocement et à date normale dans différents lieux et étudient son comportement via deux tests.
Le premier s’appelle l’épreuve de distinction, homogénéité et stabilité (DHS) : elle examine notamment le port du feuillage. Le second évalue la valeur agronomique, technologique et environnementale (VATE) de la variété de chicorée une fois qu’elle a été récoltée. On se penche ici sur la quantité de matière sèche présente dans la racine et sur son poids, qui est comparé à celui de deux
variétés témoins, la variété Orchies et la variété Fluor. La nouvelle variété doit apporter un mieux par rapport à ces variétés témoins. Si c’est le cas, la nouvelle variété pourra être inscrite au
Catalogue et commercialisée.
Sur quels critères travaille-t-on actuellement pour améliorer les semences de chicorée ?
Deux caractéristiques très importantes de la chicorée concernent son rendement racine et sa quantité de matière sèche. La matière sèche est ce que l'on obtient lorsqu'on retire l'eau de la racine. On cherche actuellement à ce que la racine ait moins d’eau et plus de matière.
On travaille aussi à développer des
espèces qui lèvent plus rapidement. Car plus la plante pousse vite, plus elle couvre vite la surface du sol. Elle empêche ainsi les mauvaises herbes de pousser, ce qui permet d’utiliser moins de traitements. En outre, on essaye aussi d’améliorer la
résistance aux maladies, les plus fréquentes étant la rouille, l’oïdium et Alternaria. Enfin, nous améliorons la forme de la racine pour rendre la récolte plus facile. On juge qu’une racine est intéressante quand elle est bien conique, bien épaulée.
Vous parlez de matière sèche. Quelle est l’importance de ce paramètre ?
Le prix de la chicorée pour le planteur est notamment déterminé par la quantité de matière sèche. En effet, le poids net de la racine est corrigé par sa teneur en matière sèche, ce qui donne une valorisation supplémentaire à la marchandise. Ainsi, au minimum, cette matière sèche doit être de 23%.
Le planteur (agriculteur) désire donc des
variétés dites lourdes, c’est-à-dire qui contiennent beaucoup de matière sèche : cela lui permet de payer moins de transport pour la même quantité de matière sèche de chicorée.
Existe-t-il de nombreuses variétés de chicorée sur le marché ?
La culture de la chicorée est une culture de niche, dite mineure. En France, actuellement, on en cultive environ 2.000 hectares pour la chicorée à café.
Douze
variétés sont inscrites au
catalogue, mais seules quatre sont commercialisées. Une cinquième vient juste d’arrêter d’être commercialisée, car ses rendements variaient trop selon les années.
Concernant l’écologie, la chicorée est-elle une culture propre ?
Oui. La chicorée est une plante assez rustique qui n’est pas gourmande en fongicides et en insecticides. Et elle n’a pas attendu le Grenelle de l’environnement pour réduire la quantité de traitements nécessaires à sa culture.
Depuis des années, nous travaillons avec les firmes phytosanitaires pour améliorer le rendement de la chicorée et pour raisonner l’utilisation des herbicides. Désormais, on utilise des produits herbicides à plus petites doses. Grâce à cette technique, qui s’accompagne d’une lutte mécanique contre les mauvaises herbes via le binage, on réduit la pression phytosanitaire. Cela favorise l’aération et le réchauffement du sol, ainsi que son activité microbienne.
Travaillez-vous également sur l'amertume de la chicorée ?
Oui. D’ores et déjà, les
sélectionneurs proposent des
variétés moins amères. C’est la connaissance du
génome de la plante qui a permis cette avancée, car on a identifié le
gène de l’amertume. Mais l’objectif n’est pas de le faire disparaître totalement !