En quoi consiste aujourd’hui votre poste ? Quels sont vos principaux objectifs ?
Maintenant retraité, je m'occupe des Ressources génétiques à Pro-Maïs (Association des 10 sélectionneurs de maïs en France, dont les objectifs sont la recherche et la conservation de ressources génétiques). Je participe également à la Fondation pour la Recherche en Biodiversité (organisme public qui fait de la recherche sur la biodiversité au sens large, qu’elle soit sauvage ou domestique) et à des évènements de l'interprofession des semences et plants et d'Arvalis.
Quelles sont vos « sources » pour l’amélioration des plantes ?
Celles de tous les
sélectionneurs qui cherchent à maximiser la diversité de leurs « populations de départ » pour rendre leur sélection plus efficace ! C’est-à-dire la biodiversité mondiale d'une
espèce végétale domestiquée, à l'histoire millénaire. Il faut aller la chercher dans les « banques de
gènes » publiques mondiales et dans les dizaines de milliers de
variétés créées par les sélectionneurs publics et privés de la planète. Les variétés « de pays » (variétés ayant toujours été cultivées, avant la mise en place des
hybrides F1) encore cultivées sont une ressource peu utilisée mais que les nouveaux outils de la sélection assistée par marqueurs vont permettre de mieux inclure dans les projets.
Que faites-vous pour les préserver et les régénérer ?
Je participe avec les autres
sélectionneurs à la préservation des
Ressources Génétiques : exemple de Pro-maïs et de ses 1.300
variétés anciennes conservées dans la « collection de réseau ». Je défends l'option de la protection par les Certificats d’Obtention Végétale, qui permet l'accès à toutes les ressources génétiques commercialisées et l'enrichissement permanent de la biodiversité disponible d'une
espèce. Je participe aux projets de recherche génétique de Pro-maïs sur la biodiversité du genre Zea (projet Diversité Zea) qui aide les sélectionneurs dans la connaissance, la préservation, l'utilisation raisonnée de la biodiversité de leur espèce. Je participe aussi à la communication avec les agriculteurs et le grand public sur les ressources génétiques disponibles : exemple de la Collection Nationale de maïs (500 variétés et
lignées anciennes mises à disposition du public, collection ouverte à tout le monde).
Qui peut les utiliser ? Sont-elles accessibles à tous ?
La Collection Nationale de
Ressources Génétiques en maïs française est accessible gratuitement à tous (500
variétés anciennes).
La Collection de Réseau (collection plus complète) est quant à elle accessible à tous les membres
sélectionneurs.
Enfin, les variétés commerciales (
hybrides) sont protégées par un Certificat d’Obtention Végétale et accessibles à tous comme source de sélection.
Comment identifiez-vous les attentes de la société ? Comment y répondez-vous dans votre métier de sélectionneur ?
La société attend notre contribution à une agriculture durable. Les
sélectionneurs sont particulièrement bien placés et efficaces pour répondre à cet objectif qui passe...
- par l’amélioration des variétés concernant les tolérances aux maladies et aux ravageurs (qui réduisent l'emploi de fongicides et d’insecticides), aux stress de froid, à la sécheresse, à la chaleur, etc.
- par l’augmentation de la productivité comme meilleure réponse à l'accroissement de la demande et à la raréfaction de la terre et de l'eau, et comme meilleure façon de limiter la surface cultivée au profit des surfaces sauvages, où se trouve plus de 99% de la biodiversité.
Citez-nous quelques exemples concrets d’amélioration végétale.
Au cours des cinquante dernières années, la sélection moderne des
hybrides F1 de maïs a permis une amélioration constante de leur
tolérance à la sècheresse. Les études portent sur de longues périodes : sont testés dans le même champ des
variétés datant de différentes époques depuis les années 50. Pour la tolérance à la sécheresse, on fait subir à ces collections un stress hydrique. Les variétés modernes sont les plus tolérantes à la sécheresse.
L’amélioration de la digestibilité du maïs fourrage pour les vaches laitières est un autre grand critère de sélection en Europe du Nord.
Comment est financé ce travail de recherche ? Quel est l'intérêt du « Certificat d'Obtention Végétale » ?
La sélection massale, pratiquée par nos ancêtres, consistait à choisir après la récolte les plus beaux épis pour en faire sa propre
semence l’année suivante. Les méthodes actuelles sont infiniment plus efficaces, mais aussi plus complexes (création de
lignées pures et d’
hybrides F1, expérimentation en micro-parcelles). La création d'une nouvelle variété demande ainsi aujourd’hui 8 à 10 ans de recherche, avec en particulier de grands réseaux d'expérimentation multi-locaux et multi-annuels chez l'agriculteur. Les budgets nécessaires demandent en retour une protection commerciale de l'obtention sur sa durée de vie (5 à 10 ans dans la pratique). Le système COV a l'avantage d'assurer cette protection, tout en maintenant l'accès à la génétique pour tous dans un but de création variétale.