Comment est né ce partenariat avec les Restos du Cœur ?
Tout a commencé en 2014. À l’origine, un Jardin du Cœur à proximité de notre siège social dans la région lyonnaise nous a sollicités pour fournir des graines et apporter du conseil technique. De fil en aiguille, des discussions au niveau local, puis national, est née l’envie d’un partenariat à long terme étendu à tous les jardins sur le territoire. Aujourd’hui, nous couvrons une partie des besoins annuels en graines des 42 jardins d’insertion et des 56 jardins de proximité. Cela représente 10 à 20 000 sachets par an.
Concrètement, comment cela se passe ?
À l’automne, les gestionnaires des Jardins choisissent dans une liste d’espèces disponibles ce dont ils ont besoin. Ils passent une commande globale que nous livrons en décembre. Les graines sont ensuite réparties entre les unités suivant leurs souhaits. Une vingtaine d’espèces potagères sont semées dans les Jardins, des carottes, concombres, courgettes, radis, poivrons, tomates, haricots pour les principales. Nous fournissons également quelques plantes aromatiques, des tournesols pour attirer les pollinisateurs et des fleurs pour embellir les espaces ou comme plantes compagnes pour protéger les cultures. Les capucines par exemple sont un piège pour les pucerons.
Quel est l’objectif social des Jardins ?
Les Jardins du Cœur font partie des ateliers et chantiers d’insertion (ACI) dont l’objet est de proposer un accompagnement et une activité professionnelle aux personnes éloignées de l’emploi qui rencontrent des difficultés sociales et professionnelles particulières. Chaque année, les professionnels et bénévoles des Jardins soutiennent près de 1000 personnes. À travers un contrat d’insertion de 12 à 24 mois, celles-ci réapprennent le quotidien d’un salarié avec des horaires à respecter, un rythme à retrouver, des tâches à accomplir, une équipe dans laquelle s’intégrer. Les Restos n’ont pas vocation à former des maraîchers mais plus largement à aider les personnes à construire leur projet professionnel et à les amener vers l’emploi durable ou la formation. En parallèle, les 400 tonnes de fruits et légumes frais produits par an sont distribués aux bénéficiaires accueillis par l’Association. Ces jardins d’insertion ont donc une double utilité sociale. Tout comme les Jardins de proximité. Ceux-ci offrent aux personnes accueillies du lien social et un accompagnement. Leur production est valorisée en circuit court dans les Restos du Coeur.
Quelles valeurs sont associées au jardinage ?
Le jardin est un support extraordinaire pour retrouver confiance en soi. Passer du temps à travailler la terre, se reconnecter à la nature, voir les graines germer, les plantes pousser et avoir la fierté de récolter des légumes, tout ça redonne du sens dans le travail. Il y a quelque chose de magique. Le jardinage véhicule aussi des notions d’égalité et d’humilité. Tout le monde est sur un même pied et chacun peut réussir mais aussi échouer à cause des aléas climatiques ou des maladies et des ravageurs. Et quand une personne réussit à produire alors que sa confiance en soi est ébranlée, c’est personnellement valorisant.
Vous semblez attachée à ce partenariat ?
Oui, nous sommes fiers de contribuer à notre échelle à aider les personnes abimées par la vie à retrouver le chemin de l’emploi. Cela s’inscrit dans la droite ligne de ce qu’a initié la famille Vilmorin il y a 280 ans. Rendre le jardinage accessible à tous, montrer que tout le monde peut réussir à cultiver ses légumes, et transmettre la passion du potager. Et à l’heure où l’inflation fait grimper le prix des produits frais et que le pouvoir d’achat se rétrécit, nous sommes heureux d’aider par le don de semences à ce que des personnes démunies puissent consommer des légumes frais. Le jardin présente un intérêt économique non négligeable et - faut-il le rappeler - les légumes sont bons pour la santé.
Propos recueillis par Sabine Huet